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Beauty in ashes.


Noctis Tinuviel
Vampire • Sang-Pur
Noctis Tinuviel
Noctis Tinuviel
Race : Vampire - Sang-Pur
Fonction : Métier à renseigner dans la zone RPG
Richesse : 76
Puissance : 4/5
Pouvoirs : Ici une description de vos pouvoirs.
Exodial : Nom / Race
Image du personnage : Beauty in ashes. Original
Race : Vampire - Sang-Pur
Fonction : Métier à renseigner dans la zone RPG
Richesse : 76
Puissance : 4/5
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Exodial : Nom / Race
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Race : Vampire - Sang-Pur
Fonction : Métier à renseigner dans la zone RPG
Richesse : 76
Puissance : 4/5
Pouvoirs : Ici une description de vos pouvoirs.
Exodial : Nom / Race
Image du personnage : Beauty in ashes. Original
Ven 15 Mar - 21:39




Beauty in ashes.






DENIED FROM THESE GOLDEN LANDS OF DREAMS,
MAY I HAVE THE STRENGH TO RISE ONCE MORE…





Le cœur serré mais palpitant, je me réveille en sursaut. Le mouvement brusque de mon redressement m’arrache un grommellement de douleur et je serre la mâchoire en étouffant les plaintes évoquant ma souffrance.  Je me sentais absent et en même temps viscéralement présent, perdu entre deux plans d’univers. La réalité et le rêve. Perdu. “ Je ne suis pas perdue, regarde je suis juste là. ” Mon cœur a un raté, ma respiration se bloque puis s’affole. Perdue. Je l’avais perdue. Ce rêve n’avait rien à voir avec les autres. Je n’y avait rien maitrisé du début à la fin. C’était elle qui était venue à moi. C’était elle et je l’avais perdue. La réalité me l’avait encore une fois volé… Je relève ma paume droite, y glissant mon pouce de l’autre main. Comme si je pouvais raviver la sensation de ses lèvres et ses crocs sur celle-ci. Comme si je pouvais la rappeler auprès de moi grâce aux souvenirs, comme je l’avais si souvent fait dans mes rêves. “ Mais d’accord, retrouve-moi. Jouons à cache-cache ! ” Nouvelle vision, nouvelle réminiscence de nôtre rêve. Je ferme les yeux et son sourire de défi m’apparaît. Ses pommettes sont humides de ses larmes passées, réhaussées par ses lèvres étirées vers ses yeux en amandes. Mais plus une larme à l’horizon… Disparues comme leur créatrice dans cette vérité qui semblait promptement factice. Puis elle se rapproche et mon expression se froisse dans la réalité. Je me souvenais de son désarrois mais la crise d’angoisse passée ne semblait soudainement n’avoir jamais existée. Taquine, elle s’était approchée jusqu’à frôler ses lèvres des miennes. Et je frémissais dans mon souvenir alors qu’elle se jouait de la situation. Je ne comprends toujours pas ce revirement de comportement. Une minute auparavant elle se brisait dans mes bras. L’autre…


Je ratais quelque chose. J’essaye de reprendre contenance et de me plonger de nouveau dans le souvenir flou de ce songe. Je suis à la fois si fatigué et incapable de tenir en place. J’ai l’impression d’omettre quelque chose d’essentiel. Tout ceci n’était pas qu’un jeu farfelu, n’est-ce pas ? J’apporte une main contre mon front et masse lentement mes tempes. Qu’avait-elle dit déjà ? Un indice… Oui. Je devais me souvenir. J’avais la sensation désagréable que tout ceci n’était pas à prendre la légère. Un mal-être viscéral qui me rendait presque chancelant. Mes entrailles étaient en charpies et ma tête tambourinait avec violence. Ce rêve était important. Je devais me souvenir. Il y avait eu le dôme et puis l’Écailleux. Le dôme.. mit à mal par le Rougeoyant. La copie conforme de mon épouse au pied de Tescanda, blessée, salie, pâle.. si pâle. Je repose soudainement ma main contre le drap de soie et ouvre les yeux. Happé par la terreur, j’avais renfloué le cauchemar. Non. Non.. Je refusais de subir à nouveau ce souvenir. Mon corps s’était figé dans son entièreté, respiration comprise et je peinais à reprendre le contrôle de celui-ci. Mon esprit tétanisé faisait ricocher son état dans tout mon être. Mais si celui-ci refusait de voir la vérité en face, je devais pourtant faire face. Je devais persister et vaincre cette vision détestable. Tescanda impuissant. Ma femme.. meurtrie. Son armure en lambeaux et sa peau laiteuse tâchée de boue, d’ecchymoses et de sang. Ma si chère et aimée épouse.. aux pieds de Mialekh, la Mort personnifiée. C’était là mon pire cauchemar. Je pouvais tout vivre. Tout survivre. Sept cent quarante-huit ans de traque sauvage, huit cent soixante-six ans de pseudo régence à m’en rendre malade, j’aurais pu revivre ces mille six cents ans de solitude. Je l’aurais fait sans hésiter. Aujourd’hui, dans la seconde même. Une bien douce torture plutôt que d’assister à son décès. Comment continuer de me voiler la face si j’avais désormais la preuve de son départ irrémédiable ? Continuer une éternité sans elle m’aurait pris la vie. Les enfants ne me l’auraient jamais pardonné et elle non plus. Mais si c’était là le coût à payer pour la retrouver dans une autre existence, j’étais prêt à offrir mon âme à Mialekh à ses côtés.


Je ressens alors les sanglots monter et avec eux mon corps qui frémit. J’essaye de faire abstraction. Pour elle. Pour elle. Pour elle. Pour elle… J’inspire et expire profondément, et j’agrippe à nouveau le fil de mes souvenirs. La scène figée autour de moi, reprends petit à petit vie... Je revois les alentours se faire grignoter par le néant alors que son illusion s’écroule. D’autres détails d’importance me reviennent aussi. Les yeux voilés d’Aiko, à moitié présente avec moi. La froideur soudaine de son corps contre mes mains. Tout ceci me rappelait sa transformation alors que le venin parcourait ses veines pour dévorer tout ce qui faisait d’elle, une mortelle trop fragile. Peut-être que ce changement radical de comportement n’était pas de son fait, ni de celui du rêve. Peut-être que la source était autre. Si elle avait réussi à projeter son inconscient vers le mien par le plan ombral, si Tescanda ne s’éveillait toujours pas, … Cela voulait bien dire une seule et unique chose. Ma femme était captive depuis la Fissure. Et soit elle avait trouvé un moyen de me contacter, soit quelqu’un lui était venue en aide.


Captive. Oui.. Je l’avais pensé aussi dans le rêve. Sinon comment expliquer ce silence ces trois dernières années ? J’avais besoin de plus d’informations. Alors vint l’illusion suivante. “ Je te donne un indice, mon amour. ” L’indice. Un plafond uniforme et blanc. Des silhouettes floues qui se déplacent et se penchent au-dessus de nous. L’odeur désagréable des remèdes d’alchimie et une pointe d’écorce et d’humidité. Une forêt dense. Elle semble heureuse, elle dénote complètement de ce qu’elle me transmets. Le changement radical de comportement, la chute de température de son corps, ses pupilles se dilatant bien trop pour n’être liée qu’au bonheur. Mon épouse était captive. Captive et droguée, et elle venait probablement de prendre une dose de cheval à l’instant même. Ma. Femme. Était. Séquestrée. Tout mon être se mit à trembler dans la réalité alors que mes yeux se fermaient dans le songe. “ Retrouve moi, et allons ensuite dans le plus beau des endroits. ” Murmure-t-elle ses lèvres contre les miennes. J’ouvre instinctivement les yeux sur elle, tout ça pour la voir disparaître comme un nuage d’été…


Je projette mes bras en avant pour la rattraper. Mais dans la réalité il n’y a rien, ni personne. Et le retour à celle-ci me frappe avec effroi. Les tremblements se font plus violent alors que je réalise ce qui vient de se passer, ce que je viens de comprendre.. mais je ferme mon esprit un instant et m’expulse du lit avec violence. Je manque de m’étaler au sol, j’avais oublié l’état de mon misérable corps. Entre le rêve et ici, je n’étais plus le même homme. Mes muscles crient à l’agonie et pourtant mes jambes me soutiennent par miracle jusqu’au bureau le plus proche. Je ne prends pas le temps de m’installer et j’attrape la première feuille qui vient avec violence. Je me fous de l’importance du document que je griffonne d’une main malhabile et furieuse. J’y note tous les détails dont je me souviens. Le lieu, les odeurs, la taille et le nombre de personnes, les affects du produit, … Lorsque la plume que je tenais, crispé à m’en faire mal aux doigts, apposa la dernière lettre, seulement là, je me permis de m’effondrer. La plume vint s’écraser sur le sol, en même temps que mon propre corps qui avait lâché complètement.


Les yeux écarquillés sur le néant, je laissais les larmes venir et la froideur du sol m’envelopper. Recroquevillé, je me laissais submerger comme un enfant, incapable de contenir et de contrôler mes émotions. Les membres mous, sans vie contre le carrelage gelé. Comme si le temps s’était figé, mon propre corps semblait abandonner ses réflexes. Je ne clignais presque plus des yeux, ne respirait que par à-coups, il n’y avait plus que les larmes, le froid, la douleur, la sueur et les tremblements s’intensifiant. Le stylo s’était brisé entre le corps et la plume, laissant couler sa faible réserve d’encre de jais contenue dans la partie métallique. Et je me focalisais sur le liquide abyssal pour ne pas me laisser sombrer dans les limbes. Je ne pouvais pas craquer complètement. Je n’avais ni le temps, ni le droit. Puis vint à nouveau la nausée... Agressive, impossible à ignorer. Comme si une alarme avait retentie dans ma tête, un mécanisme de défense s’enclenchait, forçant mon corps à reprendre vie, même si pour ça il fallait me mettre à mal. Un pic de douleur me perça le cœur, alors que le muscle se contractait avec trop de violence. Je fermais les yeux avec force, subissant l’attaque. Puis tout aussi abruptement vint la délivrance, diffuse, trop lente mais salvatrice pour autant. Bien que de courte durée tant je dû me relever avec rapidité pour me diriger vers la salle de bain adjacente. Le trajet fut laborieux et je failli me donner raison et m’arrêter en cours de route. Treize pas plus loin, je posais mes mains tremblantes contre le marbre froid, me focalisant sur ma respiration hératique, tentant par tous les moyens de contenir mes entrailles.


Inutilement. La sensation de picotement dans ma bouche n’était que le précurseur de la maladie à venir. Je sentis la caresse persistante et désagréable de ma salive contre mes joues et je déversa mes entrailles en deux temps. La première par nécessité, la deuxième par dégout. Alors que j’actionnais la robinetterie argentée pour que l’eau évacue toutes traces de ma faiblesse, j’espérais inconsciemment que les larmes feraient de même pour ma peine. Je savais pourtant plus que quiconque que ce n’était pas possible. Je me laissa glisser au sol, dos contre le meuble, genou relevé et tête penché dans ceux-ci ; et je resta ainsi près d’une heure. Attendant la fin de la nausée, la fin de cette crise qui n’avait pas le droit de m’envahir. Je devais faire mieux pour elle. Je devais me relever, reprendre des forces et partir à sa recherche moi-même. Pour elle. Pour elle. Pour elle. Pour elle. Rester en vie, pour elle.


Je pris le temps de m’occuper de moi quelques longues minutes. Effacer les traces, encore et toujours. Le gout ignoble et persistant en bouche. La sueur désormais froide recouvrant mon corps. Les cernes et les rougeurs habillant mes yeux d’un voile morbide. Changer de vêtements pour pouvoir enfin sortir de cette chambre glaciale. J’aurais pu retourner dans les draps froids et me complaire de nouveau dans l’illusion. Mais elle était vivante. Elle était vivante, n’est-ce pas ? Avais-je seulement le droit de me permettre cette hypothèse ? Cette.. vérité.. je la souhaitais si fort depuis déjà tant de temps. Trois putain d’années. Huit mois de recherches intensives sur le terrain avant d’être rappelé à Roncëlyon. Puis quatre mois à attendre les nouvelles de Gabriel comme un fou à lier. Quatre mois à me laisser pourrir de l’intérieur tant j’étais rongé par la culpabilité. Celle de ne pas l’avoir protégé contre ces monstruosités et celle de ne pas pouvoir abandonner cette couronne sans foutre ce royaume à feu et à sang. Alexstrasza n'était plus. Notre fils était trop jeune pour devenir roi. Laïna avait fui et n’était revenu que depuis peu. Et Nyx.. Ma chère et flamboyante fille que j’avais failli tuer à peine nous était-elle revenue... Notre famille.. Notre famille était en ruine et en majorité par ma faute. Aiko avait toujours été mon pilier, notre pilier. Dès la première cassure, j’aurais dû la renvoyer elle et les enfants en lieu sûr. Cette guerre contre Vënrya avait ébréché son âme. La Fissure l’avait fait s’effondrer. Elle, puis moi et nos enfants avec. Sans lune, sans phare et sans pilier. Nous ne pouvions que nous écrouler et nous échouer contre les rochers.


En toute honnêteté, je crois que j’avais surtout peur. Peur d’y croire trop fort. Peur du retour de bâton si tout ceci n’était encore qu’un fantasme de mon esprit malade. Me rapprochant du bureau et attrapant le document griffonné, j’observais un instant les mots notés à travers les tâches d’encre créé par une main souffrante. C’était lisible mais l’écriture était tremblante au possible, je rangea néanmoins précieusement le document dans la poche interne de ma veste. Si tout ça n’était que dans ma tête.. Pourquoi maintenant ? Pourquoi ainsi ? Pourquoi cet.. indice ? Cette farce que je m’infligeais chaque jour me convenait parfaitement. Dormir pour la rejoindre était devenu aussi facile que de respirer et me priver du reste. Ça valait mieux que d’accepter sa mort. Mes pensées fusaient à mille à l’heure alors que tout autour de moi n’était que silence. Les tremblements et les larmes s’étaient taris laissant place à un espoir désagréable et vertigineux. Déstabilisant. Aussi efficace et envahissante que le venin, cette espérance obnubilait désormais tout mon esprit. Alors d’un pas certes chancelant mais décidé, je me dirigeais vers les appartements des enfants. Enaërel fut appelé par les domestiques, en panique de me voir sorti à cette heure-ci de mes quartiers. Il se ramena à ma hauteur en m’interpelant par mon titre, les mains à moitiés tendues vers moi, conscient de sa place mais tangiblement inquiet pour mon équilibre précaire.



Je dois parler à mon fils. Pourrais-tu.. J’ai besoin.. Je manquais de souffle. De cohérence. De tout.
Je vous ramène de quoi vous réhydrater et vous nourrir rapidement. Votre Majesté.. Ne forcez pas, je vous en prie.



Je fronça les sourcils sur ce conseil déplacé mais j’acquiesça en silence avant de reprendre ma route. Le suivant s’élança dans une course folle vers les cuisines, sachant très bien mon avis sur la question non dites. Je ne voulais pas d’audience, pas de gardes, pas de pitié. Surtout pas lorsque j’observais avec attention mon prochain défi. Les escaliers… Pourquoi Alexstrasza avait-elle fait construire Babylon en une tour gigantesque ? Ce perchoir draconique était une plaie pour les infirmes. J’essayais tant bien que mal de maintenir ma dignité et mon courage à la surface de l’eau. Sombrer voudrait dire tomber. Et dans mon état je doutais fortement de ce qui ressortirait de cette dégringolade. Un vieux tas d’os froid potentiellement. Je devais cependant me hâter. Nous avions déjà perdu bien trop de temps. Même si je n’avais jamais fait stopper les recherches dans l’ombre, j’étais le mieux placé pour la trouver par inadvertance. Ça avait toujours été. Soit je la trouverais, soit elle me tomberait dessus avec maladresse. C’était là le nœud de notre destinée entrelacée.


Je devais prévenir les enfants. Ils prendraient les mesures nécessaires pour guider les recherches plus efficacement et je pourrais me concentrer sur ce stupide corps de lâche. Et ces putains d’escaliers étaient la première marche vers ma prise en main. Alors un pas après l’autre, je descendais lentement mais surement vers ma destination et vers ma guérison. Après un effort non négligeable, j’atteins enfin l’aile ouest. Perdre la faculté de me téléporter n’avait jamais semblé être un soucis. Aujourd’hui, je m’en mordais les doigts. Je passa la porte de l’étude de mon fils, là où je savais le trouver. Bien qu’il était excessivement tôt, j’avais eu vent des horaires ridicules qu'il s’imposait récemment. Il releva la tête de ses documents envahissant son bureau digne du plus grand des conseillers et son regard encore endormi s’habilla de multiples émotions. Choc, soulagement, joie et soudainement de la peur. Mes jambes chancelantes m’avait presque abandonnés l’espace d’une seconde et je dus me tenir à la console de l’entrée pour ne pas flancher pour de bon. Quelle honte. Quelle foutue honte. L’air s’échauffa autour de moi et dans un crépitement doux, Gabriel se téléporta à mes côtés pour me soutenir.



Bordel de Dieux, qu’est-ce que tu fais si loin de tes quartiers ? Pourquoi tu ne m’as pas fait appeler ? ..Tout va bien ?



Me demanda-t-il d’abord remonté puis sincèrement anxieux. Il apposa une main contre mon front, brûlant, et je repris mon souffle petit à petit alors que mon fils me guidait jusqu’à la méridienne du canapé. Il plaça deux oreillers contre le dossier avant de m’installer et me dévisager, je devais probablement avoir une tête des plus inquiétantes mais Gabriel ne me pressa cependant pas avec une nouvelle question. Il me ramena un verre d’eau, que je descendis d’une traite tant j’étais déshydraté et s’installa à côté de moi.



Tu vas me prendre pour un fou. Soufflais-je enfin au bout d’une minute.
Pour l’instant je me demande surtout ce que tu fais ici alors qu’il n’est même pas cinq heures du matin. Et tu n’as répondu à aucune de mes questions, ce qui m’inquiète d’autant plus, vu ton apparence. On dirait que tu as vu un fantôme dans le couloir et que tu as couru jusqu’ici.
Pas dans le couloir. Rallais-je mêlant ironie et sincérité.
… S’il te plait papa.. Demanda-t-il après un soupir d’appréhension.
Elle est vivante Gabriel. J’avais planté mes iris dans les siennes, voilées de douceur et d’amertume.
Tu as encore rêvé de maman ? Questionna-t-il en détournant le regard sur ses mains jointes.
Oui ! Impulsive et joyeuse, ma voix s’était levée plus vite que mes pensées. Le silence qui suivi s’accompagna de la réalisation de ce mensonge. Non ! Non, c’était différent cette fois.



Les domestiques vinrent nous stopper en cours de discussion. Gabriel se releva pour surveiller qui entrait et ce qui était amené. Enaërel et l’un de ses subordonnés s’approchèrent du petit salon, déposant deux plateaux devant moi. L’un avec un repas chaud sous cloche, l’autre avec des pâtisseries et des fruits fraichement découpés. Le tout agrémenté de trois carafes, du sang frais, du thé aux notes boisées et du café amer mais fortement parfumé. Je remercia mon suivant et son acolyte, Gabriel en fit de même en s’installant de nouveau à mes côtés et le silence se jeta sur nous lorsque la porte se referma. Alors en expirant profondément, je me glissais sur le côté de la méridienne pour faire face à mon fils. Attrapant son avant-bras de ma main encore tremblotante sous le moindre effort, je plantais néanmoins mon regard brillant dans ses iris vairons, me perdant dans le bleu de sa mère avec plus de facilité que dans l’or flamboyant.



Je t’avais dit que tu allais me prendre pour un fou. Mais je te promets que j’ai conscience de ce que je te demande de croire. Je n’ai pas rêvé d’elle. Aiko.. est venue à moi.



Aiko. C’était la première fois en trois ans que je prononçais son prénom. Je l’avais énoncé avec douceur, dans un souffle empli d’espoir, d’amour et de crainte. Gabriel sembla se figer lui aussi face à ce prénom porté par ma voix, comme moi auparavant quand la vérité m’avait frappé au réveil. Je m’étais effondré à sa disparition, si profondément que mentionner ou entendre son prénom me brisait sur place. J’avais usé de tous les stratagèmes pour ne plus qu’on me rappelle son absence. Aiko était devenue pronom, surnoms et titres. Des blessures quotidiennes plus faciles à supporter que d’entendre les syllabes qui formait sa réelle identité.


Je resserrais tant bien que mal ma prise autour du bras de mon fils. Me rendant soudainement compte d’à quel point il avait changé depuis le début du conflit avec Vënrya. L’enfant avait définitivement fait place à l’homme, physiquement mais aussi mentalement. Alors avec vulnérabilité et sincérité, je lui donnais mes preuves. Élaborant les détails de ce monde onirique qui était devenu ma normalité, mon échappatoire. Faisant le contraste avec ce dernier songe où je ne maîtrisais rien et où sa mère était apparue par magie. J’ignorais le moyen qu’elle avait usé mais le doute n’était pas possible tant les différences me frappait. Elle avait modulé le rêve à sa guise, m’avait montré la Fissure, sa bataille acharnée pour rester en vie et un aperçu de sa réalité. Je sortais alors le document froissé, tâché et griffonné que je transmettait à mon fils pour appuyer mes propos.



Sur la fin, elle divaguait et elle perdait le contrôle. Au vu des réactions de son corps, je pense qu’elle… Non, je suis sûr qu’elle est captive quelque part. Je vais reprendre les recherches Gabriel.
Je.. Il posa sa tête contre l’une de ses mains et respira profondément avant de me refaire face. Je ne sais pas trop quoi en penser. Tu sais pourtant que nous n’avons jamais cessé de chercher même si les ressources sont désormais bien moindres.
Je sais. Je ne t’annonce pas que je vais quadrupler les effectifs non plus. Je sais que nous ne pouvons pas. J’ai encore les chiffres en tête, aussi faible puis-je être, je ne suis pas encore un légume inutile.
Père, ce n’est pas ce que..
JE vais reprendre les recherches, fils.



Le coupais-je dans ses excuses inutiles. Il me dévisagea un instant avec silence, puis il observa d’un coup d’œil rapide mon corps amaigri en grimaçant furtivement. Le laissant faire à sa guise, j’attrapais au passage un verre de sang tiède que je bus avant qu’il ne refroidisse pour de bon. Le Prince Héritier ne semblait pas être favorable à ma requête, à juste titre certes. Mais je n’étais pas apte à lui laisser avoir le dernier mot, pas cette fois-ci.



Ce n’est pas une bonne idée. Trancha-t-il avec franchise.
Je n’ai pas dis que c’en était une. Répondis-je en picorant quelques fruits.
Je ne peux pas te laisser faire ça.
Et pourtant tu le feras, tu dois le faire.
Tu n’es pas en état.. Je n’ai pas oublié la disparition soudaine des cristallines dans tout le château.
Donne-moi une semaine.
Non.
Une semaine Gabriel. Répétais-je plus durement.



Gabriel claqua sa langue en désapprouvant avant de se relever pour faire les cents pas. Je me concentrait alors sur la seule priorité du moment pour moi. Reprendre des forces. Je picorais ça et là, incapable de finir quoi que ce soit, ni même de toucher à certaines choses tant la nourriture était devenu mon ennemie jurée tout ce temps. Certaines odeurs me rebutaient totalement. J’avais un appétit d’oiseau mais je mangeais enfin à peu près décemment. Je termina mon repas par un deuxième demi-verre de liquide carmin que je me força à avaler comme tout le reste de ma pitance. Malgré le peu que j’avais ingéré, j’avais l’impression d’avoir trahis mon propre corps. La boule au ventre, presque nauséeux, je savais que je venais de me barrer la route que j’avais pris durant deux ans et demi. J’avais presque la sensation d’être fiévreux et éméché, les sueurs froides et les frissons que je ressentais trahissaient le mal-être de mon corps qui n’avait plus l’habitude de recevoir autant. Alors je m’adossais contre la méridienne en soupirant profondément, le regard fixé au plafond. Gabriel daigne enfin me rejoindre après quelques minutes de plus, me laissant le temps de reprendre un semblant d’apaisement en me concentrant sur ma respiration tout ce temps durant.



Si dans une semaine je ne vais pas mieux, si je retombe dans mes travers, tu pourras prendre la décision de ton choix. Dis-je enfin avant de me redresser pour poser ma main contre son épaule. J’ai fait un pas vers toi pour la femme de ta vie. Fais en de même pour la mienne.
Laisse Ariane en dehors de ça. J’essaye juste de te protéger et de te garder en vie.
Je sais. Répondis-je en souriant. Je me réavançais au bord du canapé et attira Gabriel à moi dans une étreinte. Je suis désolé, fils. Pour tout ça. Je te serais toujours reconnaissant pour tout ce que tu as fais durant ces trois ans. Pour avoir veillé sur ce qui restait de moi…



Je ne sais pas ce qui le choqua le plus. L’étreinte, les excuses, la reconnaissance ou la culpabilité. Quoi qu’il en soit, Gabriel resta quelques secondes sans réaction avant de finalement passer ses bras autour de moi. Posant sa tête contre mon épaule comme il l’avait si souvent fait étant enfant. Cherchant du réconfort dans des larmes qu’il ne se laissait pas pleurer. Je le savais. C’était mon fils. Et sur bien des aspects cet idiot avait prit de moi. Je le laissa se reculer le premier, mettant fin à ce moment de tendresse rare entre nous.



C’est normal papa. Je t’aime, brisé ou pas. Des paroles qui me gonfla le cœur de gratitude.
Je t’aime aussi mon grand. J’espère que tu pourras souffler bientôt, je reviendrais pour de bon cette fois, avec ta mère. Je ne vous abandonne plus.
Même si tu te rends compte que tu as tort ? Osa-t-il avec crainte.
Je ne peux pas te promettre l’éternité Gabriel. Ces promesses là ne sont que pour ta mère. Dis-je en riant doucement. Mais je ferais tout ce que je peux pour rester le plus longtemps possible avec vous.
Mais plus.. ainsi. Précisa-t-il avec appréhension.
Non. Plus jamais.
Dans ce cas, c’est une promesse acceptable.
Une promesse et une semaine de délai donc.
Tu ne me laisses de toute façon pas d’autres choix, n’est-ce pas ?
Non en effet.
Très bien. Mets tes mains bien en évidence. Laïna m’a trop souvent trompé à ce jeu-là. Je ris avec légèreté en posant mes mains à plat sur mes cuisses.
Tu es ridicule.
Je ne prends pas de risque et tu ferais bien de te regarder dans un miroir avant de parler.
Une semaine et on en reparle. Répondis-je avec sérieux.
Hm mh.. Promis ?
Promis.
Parfait.
La régence aura au moins eu le mérite de développer ton sarcasme et ton assurance.
Ça a toujours été là, un don de maman. C’est juste qu’avant je te respectais trop pour oser te répondre de la sorte.
Outch.
Je rigole ! Pardon papa.
Une semaine et on en reparle. Répétais-je, moqueur cette fois-ci.
Même si j’adorerais faire un duel avec toi, de un tu ne prendras pas le temps et de deux, Laïna risque d’en avoir des cheveux blancs vu notre dernière confrontation.
Il serait dommage de ruiner une si belle chevelure en effet et Nyx risquerait de vouloir nous botter les fesses à voir sa sœur en désarroi !



Alors que nous éclatèrent d’un rire commun, un bruit assourdissant venant de l’extérieur nous stoppa net. Je me redressa en même temps que Gabriel. Bien plus rapidement qu’escompté, remarquant avec satisfaction que mon corps avait déjà reprit un semblant de force vitale. Pas de vertiges, ni de tremblement liés à l’agression du venin sur mes tissus et mes muscles affaiblis. La dilution était à nouveau stable et la sensation de normalité bien que des plus anormales pour le moment, me faisait malgré tout un bien fou. Gabriel se rapprocha de l’immense baie vitrée de ses appartements donnant sur Elvendil et garda le silence.



Rien en ville ? Questionnais-je sans attendre.
Non. Je ne vois rien. La nuit semble calme.



Alors c’était plus proche. Trop proche. Nouveau vacarme. Plus violent. Un bruit d’amas de pierre qui s’effondre, étouffé par les murs et la hauteur de notre localisation. Je me rappelais soudainement de l’Ordre et de leurs assauts sournois. Du timing trop parfait de cette attaque de nuit juste après la visite de ma femme dans mon subconscient. Est-ce que tout était lié ? Alors que Gabriel jetait sa veste et récupérait sa lance pour la déployer, se préparant au combat à venir, je tentais à mon tour de faire appel au plan astral. Les yeux clos, je me concentrais sur ma propre réserve d’éther. J’étais presque sur que Gabriel s’était figé et retenait son souffle, tant sa présence s’estompa soudainement. Là, dans l’océan qui était mien, la vie semblait avoir repris un semblant de cours. L’eau n’était plus un miroir lisse et abyssal. Il y avait bien peu de mouvement certes, mais la brise s’était de nouveau levée. Et sous mes pieds, les ondes habituelles dansaient un tempo plus ou moins régulier. Il me suffisait juste de tendre la main pour les faire apparaître comme je l’avais toujours fait. Mais répondraient-elles seulement à mon appel après tout ce temps ? J’avais perdu définitivement le contrôle il y a des mois. Explosant la totalité des lames de Babylon en une pluie de cristaux.


J’étais revenu pour Aiko. J’étais revenu pour les enfants. Mais je voulais me retrouver avec tout autant de ferveur. Qui étais-je sans mon don ? C’était une partie de moi. Nous étions indissociables à mes yeux. J’avais besoin d’elles comme elles avaient besoin de moi. Sans moi pas de passerelle, sans elles je perdais une partie de mon identité. J’étais né avec elles et elles étaient nées avec moi. Et bien que j’avais haï ce don des centaines d’années durant car il me mettait autant en danger qu’il me protégeait, aujourd’hui, je chérissais cette part de moi, ce pouvoir qui avait grandi et prit des proportions ridicules rivalisant avec celui d’Alexstrasza.


J’inspirais lourdement en relevant une main face à moi, déployant une faible quantité d’éther bleuté autour de moi, appelant une lame bien précise à ma poigne. Je ressenti le doux vrombissement du plan astral autour de moi, d’abord timide puis vorace. Et je dus tirer sur la corde invisible de mon lien pour calmer le flux d’éther qu’elles me volaient. Une lame. Je n’en autoriserais pas une de plus. Le but n’était pas de me mettre à mal non plus, mes réserves étaient trop faibles pour toutes les laisser revenir auprès de moi. Je pouvais tout au plus en ramener deux sur Exodus, trois avec de la chance. Comprimant et consommant l’éther, l’épée cristalline se matérialisa en lévitant avec lenteur, parfaitement droite face à moi. Je glissa un sourire à Gabriel.



On y va ? Un rire échappa à Gabriel.
Hors de question de te laisser foutre une raclée à qui que ce soit sans assurer tes arrières.
C’est bien ce que je dis. On y va.



Nouveau bruit sourd. Ca ressemblait presque à l’atterrissage lourd d’un dragon. Mais l’Ordre n’avait jamais envoyé de dragonniers. Et les nôtres n’étaient pas autorisés à stationner dans la cour interne de Babylon. C’était forcément autre chose. Mon cœur se mit à tambouriner pour une raison obscure. Je n’étais ni enthousiaste à l’idée de me battre, ni apeuré avec mon fils à mes côtés. Il était devenu divinement dangereux. Il l’était déjà à Vënrya et ces trois ans semblait l’avoir endurci davantage. Quiconque osait nous attaquer allait clairement s’en mordre les doigts. J’attrapa ma lame et fus l’espace d’une seconde emporté sous son poids. Elle contrebalança en lévitant à moitié. Une sensation fort étrange. J’allais peut-être devoir la guider à distance. Et surtout travailler à récupérer ma musculature dès que possible. J’avais une semaine. Pas un jour de plus. Et ce foutu agresseur en bas me faisait perdre un temps précieux. Je devais vite me reprendre, définir un plan de route et partir. Aiko était là quelque part dans une forêt humide et dense. Et je me devais de la trouver.



Tu peux me téléporter ?
Sans problème.
Emmène-nous dans la cour interne et sois prêt.
Toujours.



Gabriel attrapa mon bras et le crépitement de sa foudre nous envahit.



UNDER THIS EMPTY SKY OF MINE, WE ARE TOGETHER.
EVEN APART FROM EACH OTHER.
I’M HERE AND YOU’RE THERE.



— Noctis Tinuviel —
#F6C63E


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