Charge de travail supplémentaire

Charge de travail

supplémentaire

❝ Her elusive presence would
strangely never leave me. ❞

THEME

Un vacarme assourdissant me sorti de mes réflexions. La lourde porte de mon étude s’ouvrit avec fracas alors qu’un groupe de soldats armés s’inclinaient avec hâte. Je fonçais les sourcils, conscient que quelque chose de grave se tramait. Je me relevais prestement et ordonnait aux soldats de se relever d’un geste de la main.



❝

— Votre Altesse, le quartier commercial sud est attaqué par un dragon éthéré !

❞


Bon sang. Je n’avais ni le temps de porter de quoi me protéger, ni le temps de prévenir qui que ce soit. Je déléguais ça aux gardes en poste pour envoyer des renforts et j’attrapais ma lance avant de me téléporter en dehors de Babylon dans un éclair diablement large associé à un tonnerre qui assourdirait les tympans de la totalité d’Elvendil. C’était bien évidemment voulu, j’avais besoin que la population se mette à l’abri et que les soldats des autres quartiers se mettent en mouvement pour protéger les démunis. J’enchainais avec aisance les téléportations silencieuses et discrètes pour me rapprocher de ma cible. Il était immanquable. Un dragon de brume, tiens donc. Voilà un type de magie que je connaissais bien. Je doutais même d’avoir besoin de renfort au final. Contre ce genre d’adversaire, le danger venait le plus souvent de nous-même et des autres. Fort heureusement pour moi, il n’y avait plus âme qui vivait dans les parages et j’étais le premier de notre armée à arriver.


Je chargeais ma lance de l’électricité ambiante et de celle de mon propre corps. Bientôt, des arcs électriques se mirent à danser de tout son long. Je me téléporta en hauteur, au-dessus de la bête magique et lançait d’un geste vif et puissant ma lance vers le corps imposant de brume. A l’impact, l’énergie accumulée se libéra dans une tempête furieuse d’éclairs et j’atterris à quelques pas de là, à une distance respectable de l’invocation. La créature rugit d’une voix étrange, à demi audible dans son corps intangible. Il retourna son long cou vers moi, son regard vil et fantomatique perçant le mien. Une étrange sensation de déjà-vu me parcourra l’échine. La foudre qui s’était déchainée en lui avait fait évaporer une partie de l’eau qui composait son corps brumeux. Le dragon cracha une matière semblable à son corps, bien que plus épaisse et opaque. Rapidement, un nuage lourd prit possession du quartier et je savais qu’il n’allait pas falloir faire trainer cette saloperie. Il était chez nous et il n’était pas le bienvenue.


Son brouillard était typiquement ce que je redoutais. Ca me rendait aveugle et je risquais de blesser quelqu’un si je ne l’entendais pas arriver. L’air semblait même s’alourdir. A un tel point que respirer devenait difficile. Il avait condensé l’air d’eau à un tel point que j’en venais à manquer d’oxygène. La saloperie… J’étais trempé. Mais au fond une telle accumulation d’eau m’arrangeait fortement, il n’y avait rien de plus conductible que l’eau. Alors rapidement, avant de convulser sous l’eau qui envahissait ma gorge, j’aspirais la totalité de l’électricité ambiante, relevant mes cheveux tant j’en devenais statique. D’un geste à demi contrôlé à cause d’une toux instinctive pour évacuer l’eau de mes poumons, je renvoyais l’amas d’énergie vers ma lance planté dans le sol. Je n’étais pas bien sur de sa position exacte, mais la colonne de foudre était si intense qu’elle capta son métal immédiatement pour s’y accrocher. La gerbe d’éclair, ainsi redirigée par la double lame, traversa le ventre de l’animal vers le ciel, mon arme toujours planté sous lui.


L’énergie ainsi accumulée est renvoyée dans une large colonne créant rapidement des nuages sombres qui déchargèrent par de multiples éclairs tonnant, la foudre ainsi réceptionnée. Prit ainsi entre deux feux, l’invocation disparu rapidement à mesure que l’eau s’évaporait. L’air reprit son apparence normale et je pu observer une garnison à dos de griffon à bonne distance dans le ciel. Ils avaient eu la bonne idée de ne pas s’interposer. Je toussais un grand coup pour évacuer mes voies respiratoires et soufflait un grand coup, profitant de nouveau de l’air frais. J’entendis rapidement la clameur des miens, saluant mon effort, résonner tout autour de moi. Un rire léger sorti de mes lèvres alors que les soldats arrivaient sur place en chantant mes louanges. Ils en faisaient un peu trop à mon goût mais leur bonne humeur était contagieuse.


J’allais pouvoir retourner travailler l’esprit tranquille en leur déléguant le reste de la situation sur place. Je n’avais pas le temps de festoyer mais j’espérais bien que mes camarades d’armes le ferait pour moi. En attendant, j’étais désormais trempé… J’allais devoir me changer. Je donna rapidement quelques ordres, envoya un messager missionner un expert pour déceler le moindre dégât à faire réparer et salua sobrement la population qui reprenait peu à peu ses droits dans les rues. J’essora sommairement mes vêtements et ma longue chevelure, récupéra ma lance toujours planté dans le sol et saluant une dernière fois une foule de plus en plus grandissante, je disparaissais dans une fine gerbe de foudre grésillante.

Il était tard. J’étais fatigué. Épuisé même. Les diverses villes de Ran’dellah n’avaient toujours pas payé leurs taxes et j’étais face à un dilemme. Retirer nos troupes qui assuraient la sécurité de la région pour leur faire comprendre que nos soldats ne vivaient pas que d’eau fraîche ou me déplacer moi-même pour mettre les choses au clair. Je ne pouvais décemment pas quitter Babylon plus de quatre heures et honnêtement j’avais la boule au ventre rien que d’y penser. L’ultimatum de retirer la garnison en poste n’avait pas fonctionné non plus. Et dans tout les cas, je ne pouvais pas réellement me permettre de mettre en péril la sécurité des miens… Je soupirais profondément, faisant chanceler la bougie de mon bureau. Mes iris vairons attirés par sa danse chancelante découvrirent à quel point la cire avait baissé.



❝

— Déjà si tard...

❞


Soufflais-je pour moi-même d’une voix éreintée. Encore une fois, je n’avais pas vu le temps passer. En me relevant du grand bureau de marbre nervuré, je me postais une minute à la haute fenêtre la plus proche pour y observer Elvendil, qui dormait presque complètement. C’était dans ce genre de moment-là que je me rendais compte de la grandeur du Royaume de mon père. La ville était immense et ne faisait que croitre. Si jeune que j’étais, je pouvais déjà voir à quel point les quartiers autrefois en périphérie avaient maintenant bien des nouveaux voisins. Nous étions prospères malgré les Vols Draconiques. La reconstruction d’Elvendil serait bientôt achevée, tant que notre armée repoussait l’assaut des Dragons Ancestraux. Ils ne se déplaçaient jamais en groupe, dieu merci. Pour une raison tout à fait inconnue cela dit. Peut-être que chasser à plusieurs n’était pas nécessaire ou pratique au vu de l’envergure de leurs ailes ? Après tout l’un d’eux pouvait sans problème recouvrir la totalité de Babylon avec ses ailes tant il était imposant. La Grande Écailleuse que j’avais combattu était presque de la même taille et je supposais que les trois autres étaient leurs enfants. Bien plus petits et surtout ils n’étaient sortis de la Fissure qu’une fois les deux autres suffisamment déchainés. J’imaginais sans mal qu’ils tentaient de les protéger. Peut-être que comme nous, ils avaient simplement tenté de protéger les leurs…


Je passais une main lasse sur mon visage en soupirant avant de la laisser retomber, sans retenue. La fatigue me prenait de plus en plus. Je récupérais le dossier de Ran’dellah quelques secondes dans mes mains, restant là en suspens. Étais-je vraiment en état de continuer à travailler ? Pas vraiment. Je pris le dossier, jetant un œil éreinté sur le reste des demandes qui ne désemplissait pas sur le bureau de mon étude. D’un pas lent, je me dirigea vers la porte de droite qui menait directement à mon salon.


En arrivant dans mes appartements personnels, comme tous les soirs, je fis un arrêt dans la pièce principale qui contenait un petit bureau, quelques bibliothèques et un salon modeste. Les servants en charge du courrier avaient pour habitude de déposer ceux-ci sur le pupitre de chêne brûlé et d’ornements cuivrés qui trônait à gauche. Ce soir, une fois encore, le bois sombre ne s’éclairait pas sous la masse de papier blanc. Il n’y avait pas de missive pour illuminer de bonheur mes iris. Je glissais une main las sur le bois en pensant à Ariane. Depuis combien de temps n’avais-je pas eu de nouvelles ? Est-ce qu’elle était trop occupée avec les blessés des Vols Draconiques ? A moins qu’elle ne prenait lentement ses distances de moi ? Nous nous voyions si peu ces derniers temps et elle était toujours accompagnées de diverses personnes lorsqu’elle passait à Babylon pour ses recherches… Était-il possible que l’un d’eux se soit rapproché d’elle ? Est-ce que ma nouvelle position à la régence et le peu de temps que je pouvais lui offrir lui pesait ? Peut-être.. Peut-être que j’étais trop égoïste.


Non, je me faisais surement des idées… Depuis la guerre, elle devait surement courir partout pour soigner les blessées. Je ne pouvais décemment pas être jaloux de mourants et encore moins de ses camarades soignants… Ce n’était pas sa faute si ses rares visites à Babylon ne lui permettait pas de venir me voir. De plus, nous devions rester discret. J’étais ridicule… L’apercevoir par miracle lors de ses allées et venues, à la fenêtre, devait me contenter pour l’instant. Mais pour combien de temps ? Je me languissais tellement de sa présence. Nos rares moments ensemble étaient la plus belle des échappatoires à cette vie si morose et compliquée. Père n’allait pas mieux. J’avais même l’impression que c’était de pire en pire. Certes son poids c’était stabilisé… Mais son esprit… Il passait son temps à dormir. Ses rêves étaient soit d’une douceur incommensurable tant ses traits se détendaient, soit d’une violence inouïe tant il était agité et se réveillait en sursaut, pantelant et transpirant. Le voir ainsi me brisait le cœur d’une telle brutalité. Le Lion de Roncëlyon n’était plus qu’un animal déchu, attendant la fin dans le Royaume qu’il avait fait grandir. La tête au sol, le regard rivé sur le soleil, attendant la nuit pour y mourir et rejoindre les étoiles.


Un bruit sourd et répétitif me sorti de mes songes nébuleux. On frappait à la porte principale de mes appartements. Je souris, décidément, son timing était toujours impeccable. J’autorisais son entrée et le valet du Roi se glissa dans la pièce dans un silence appréciable. Il venait toujours me faire un rapport sur l’état de mon père lorsqu’il était de surveillance. Je le soupçonnais d’avoir ordonné à mes gardes personnels de le prévenir quand je quittais mon étude. Comment autrement faisait-il pour savoir ? A moins qu’il ait été si longtemps à notre service qu’il nous connaissait par cœur…



❝

— Ah, Enaërel.. Il dort je suppose ?
- Mon Prince. Me salua-t-il en s’inclinant. En effet. Vous pouvez compter sur moi pour le veiller cette nuit. Je soupire doucement.
-  Merci En’.. Je vais me reposer mais je prendrais ta relève dès l’aurore.
- Vous avez besoin de repos Votre Altesse. Protesta-t-il d’une voix inquiète.
-  Ça ira.. Ne t’inquiète pas pour moi. Il te faut prendre soin de toi aussi.
- À vos ordres…

❞


Souffla-t-il, résigné. Il sembla vouloir dire quelque chose de plus mais se ravisa, s’inclinant de nouveau et s’approchant du pas de la porte pour me laisser seul. Je l’interpella d’une voix agitée et Enaërel se retourna en silence pour me faire face. Nos regards se croisèrent et je serra les poings.



❝

— Comment.. Un soupir passa mes lèvres. Père te semblait-il plus apaisé aujourd’hui..?

❞


Les yeux du valet tombèrent au sol et mon regard refléta instantanément la douleur. Il secoua la tête silencieusement sans relever les yeux sur moi. Son respect m’insuffla un semblant de baume au cœur. Il se pencha à nouveau, plus légèrement cette fois-ci et sorti de mes appartements comme une ombre. Je déglutis et serrais les dents, renflouant la tristesse qui montait en moi. Je n’avais pas le temps de pleurer. Je n’avais plus le temps de rien pour dire vrai. Porté par un élan de motivation, je passais la double porte menant à ma chambre et son annexe. D’un geste maîtrisé, je déboutonnais d’une main ma veste avant de l’envoyer valser sur un portant non loin de la porte. Gilet et chemise suivirent rapidement le mouvement, m’arrachant un frisson alors que la fraicheur de la pièce caressait ma peau. Je me dirigea alors vers l’annexe, une large salle de bain et une partie réservé au dressing. Je fis couler un peu d’eau fraîche dans la vasque et me débarrassait du reste de mes vêtements, les abandonnant au sol à leur sort. Je n’avais ni l’envie, ni le temps de me prélasser dans un bain chaud. Dernièrement, je me réservais ce genre de plaisir uniquement lors de visite d’une charmante humaine. Autant dire, que ce n’était pas souvent… Une toilette sommaire ferait l’affaire ce soir.


Après ce moment nécessaire, je me sentais bien plus détendu. C’était devenu un rituel ancré et mon corps tout entier se préparait au sommeil qui arriverait bien assez vite. Me dirigeant vers mon lit, vêtu d’un simple pantalon en coton blanc, je m’écroulais sur le matelas. Je n’avais même pas la foi de me placer dans le bon sens, ni même de récupérer un semblant de drap pour me couvrir. J’étais épuisé. Entre le combat contre le dragon et la paperasse insurmontable de Babylon… J’étais défais. Les pieds en dehors du lit, le sommeil me gagna en moins d’une seule minute.

Le lendemain matin, je me réveillais avant l’aurore comme d’habitude. Un rapide brin de toilette pour me réveiller et me rafraichir et je m’habilla prestement, sans l’aide des domestiques que j’avais pris pour habitude de renvoyer dans tous les cas. Je n’aimais pas spécialement le traitement réservé à la famille royale. Non pas que c’était dérangeant ou dégradant, bien au contraire. Mais parfois, être un homme simple me saillait davantage. Mon rituel continua en allant prendre la suite d’Enaërel alors que le soleil ne s’était toujours pas levé. J’ouvrais la porte du Salon d’Or qui donnait sur une partie des appartements du couple royal. Le valet de mon père sorti de la chambre adjacente en prenant soin de retenir la porte pour ne pas faire de bruit. Il s’inclina dans un mouvement maladroit, la fatigue rouillant sa mobilité.



❝

—  Bonjour Enaërel.
— Bonjour, Votre Altesse. J’espère que votre sommeil fut réparateur.
— Plus que nécessaire. A ton tour maintenant… Je m’occupe de notre Roi.
— J’enverrais quelqu’un vous relever dans une heure, sans faute.
— Parfait, merci.

❞


Il savait que j’avais beaucoup de travail, l’attention qu’il me portait me touchait même si au fond, ce n’était là que son devoir. Je me plaisais à croire qu’il prenait plaisir à notre service, sinon pourquoi serait-il si dévoué à son Roi et sa famille ? Enaërel sorti du Salon d’Or et je me dirigea vers la lourde porte qui me séparait de mon paternel. Je savais d’avance la vision que j’y verrais. Et malgré tout, en poussant la porte et en le découvrant mon cœur se serra comme pour la première fois. Je referma la porte avec douceur et alla m’installer à sa hauteur, sur le même siège sur lequel était installé son valet quelques minutes auparavant. D’ici, je pouvais détailler sans peine son visage. Il semblait détendu et sa respiration bien que parfois sifflante, était régulière. Je soupirais doucement, le regard mélancolique, détaillant son visage et ses mains affinées par la perte de poids. Ses veines et ses lèvres meurtries par la soif… Bien qu’affaibli, à mes yeux pourtant, il était toujours le plus grand d’entre-nous.


Soudainement, Noctis se mit à respirer plus fort et je m’avança légèrement pour l’observer avec plus d’attention. Il serra les dents et laissa échapper une plainte, comme s’il venait de se blesser salement. Son sommeil se fit plus agité et je me sentais tout ce qu’il y avait de plus démuni. Dans l’espoir d’apaiser sa souffrance, j’agrippais sa main gauche avec les miennes, refermant mes doigts contre la paume de sa main dans un semblant d’étreinte… Puis je posais mon front contre le bord du lit, fermant les yeux avec force.



❝

— Ça va aller. Je suis là…

❞


Chuchotais-je d’une voix peinée. Je savais pertinemment que je n’étais pas la bonne personne. Ce n’était pas de moi qu’il attendait ces mots… Ma présence, notre présence ne suffirait jamais à remplir le trou béant de son âme. Pour ça, il ne fallait pas n’importe quelle étoile. Il lui fallait sa lune. Je me demandais une fois encore si maman était toujours là. Quelque part. Si je n’avais pas fais cette erreur ce jour-là, peut-être qu’elle serait toujours près de nous. Si j’avais écouté ma tendre mère… Peut-être que la souffrance, l’inqualifiable peine qui s’abattait sur nous, n’aurait jamais été. Je n’avais jamais eu de regret auparavant dans ma vie. Aucun. Mais ne pas m’être replié ce jour maudit, me hanterait toute ma vie. J’aurais beau m’excuser à chaque visite à son sépulcre, au pied de Tescanda, dans le sommeil profond de mon père… La honte et la culpabilité ne me quitterait jamais.


L’heure en compagnie de mon père passa bien trop vite à mon gout. Entre temps, je m’étais redressé mais je n’avais pas quitté la main de celui-ci. Sa chaleur était à peine perceptible et j’espérais que la mienne apaise un peu son corps fatigué. Comme prévu, le valet du Roi me fit parvenir l’une de ses suivantes, accompagnée de deux soldats Lùin pour assurer sa protection. Je la laissa prendre la relève et l’observa rapidement passer un linge humide sur son visage alors que je refermais la porte. Je soupirais profondément, désormais libéré de la vision d’un père aux antipodes de tout ce que j’avais connu.


Malgré notre discussion houleuse quelques mois après sa disparition, je savais qu’il me mentait. Bien sur qu’il y croyait encore. C’était une évidence. Comment un être ayant vécu si longtemps, ayant connu tant de vies et découvert le monde entier pouvait trouver la force de rester en vie, si ce n’est pour attendre le retour de la personne qui donnait sens à la sienne ? Alors forcément, malgré sa tentative brutale de mettre fin à mes propres espoirs, le voir ainsi s’accrocher maladroitement à la vie m’emplissait d’optimisme.


Je quittais le Salon d’Or et l’aile ouest de Babylon pour rejoindre la sud, le quartier princier dédié à mes sœurs et moi-même. En arrivant dans mon étude personnelle, j’y retrouvais le silence pesant et la montagne de documents de la veille. Je m’étirais de tout mon long en arrivant à côté du secrétaire immense et m’installait pour reprendre mon travail. La nuit avait été suffisamment reposante pour me donner l’illumination concernant les taxes. Je n’avais qu’à bloquer les caravanes de marchands sur les biens non nécessaires. Voir récupérer les taxes en amont sur les sous-traitants qui vendaient pour ces malotrus.


En voulant prendre de quoi écrire pour lancer mes nouvelles directives, je fus surpris de voir que la paperasse avait bougé. Certains documents en attente n’étaient plus à leur place. Pire encore, ils étaient regroupés dans un dossier avec une lettre fait d’un parchemin déchiré. Quel manque de classe pour finaliser un dossier si bien ficelé. J’attrapais le papier du bout des doigts, très curieux de lire les caractères d’encre noire qui l’arborait. Avec mes salutations les plus distinguées, je te prie de bien vouloir noter que je suis disposée à t’aider. Mes neurones ne firent qu’un tour et un sourire léger étira mes lèvres. La saloperie.. Elle ne m’avait même pas prévenue de son retour ! Était-ce ça que le valet avait voulu me dire ? C’était-il ravisé pour me forcer au repos ? Était-ce elle qui l’avait empêché de me prévenir ? Et que contenait donc ce dossier qu’elle m’avait chipé au nez et à la barbe ? Au diable ces questions après tout ! Je me relevais prestement. J’avais une sœur à retrouver.


Alliant une marche plus que rapide et des téléportations discrètes sur de courtes distances, j’atteins rapidement ma première cible. La bibliothèque royale. Mon hibou de sœur c’était forcément planqué dans ce trou rempli du savoir du monde. Quelle ne fut pas mon IMMENSE surprise que de découvrir une silhouette élancée et féminine, le nez plongée dans… bien trop d’ouvrages. Mon arrivée toute discrète qu’elle fut, sembla passer inaperçue. Il faut dire que j’avais largement perfectionné mon art depuis notre adolescence. Du lourd tonnerre il ne restait qu’un léger grésillement lors de mes apparitions. Mais pour ma très chère sœur, je pouvais bien faire un effort. Un large sourire sur les lèvres, je me téléportais avec le contrôle le plus ridiculement instable. Apparaissant derrière elle dans une gerbe d’éclair qui fila vers le plafond, attirée par les chandeliers de fer et d’or. Le tonnerre assourdissant retentit avec un écho tonitruant, mes propres tympans pourtant habitués soufrèrent. Je me jetais alors sur Laïna sans sommation, glissant mes bras autour de son cou, ma voix teintée d’une once de bonheur retrouvée, s’éleva sur l’écho disparaissant.



❝

— Ne serait-ce pas là ma très chère sœur, qui ne prévient même pas son frère adoré de son retour ?!!

❞



— Gabriel Tinuviel —
#5AC0E7

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Charge de travail

supplémentaire

❝ With every piece retrived,
pain shall be undone. ❞

THEME

Laïna sursauta, réellement surprise. Méfait accompli avec brio ! J’étais un peu fier de moi, il fallait l’avouer. Nos rires se mêlèrent un instant, comme au bon vieux temps… Ses mains tapotèrent mes bras, signalant sa capitulation et je libérais son corps svelte de ma prise. Je ne la quittais pas du regard tout le long de la manœuvre, inspectant soigneusement son état. Une habitude que j’avais prise avec notre Roi. Ma sœur semblait en forme, ses mains ne laissait pas apparaître une quelconque perte de poids drastique, son teint de peau était semblable à celui de mes souvenirs, ses iris ambrées brillantes et vives… La savoir en si bonne santé m’arracha un soupir de contentement. Enfin une personne dans cette famille qui semblait s’être remit suffisamment.



❝

— Adoré, c’est toi qui le dit Gab’ ! Tu as trouvé ma note ?

❞


Siffla-t-elle toute fière. La question n’en était même pas une. Je roula les yeux en l’air en soufflant entre mes lèvres, entrouvertes dans un rictus moqueur. Bien sûr que j’avais vu son mot, sinon je ne serais définitivement pas venu ici. Si j’avais besoin de documentations, j’envoyais le personnel à ma place. La moindre minute de ma journée était planifiée deux semaines à l’avance minimum. Cette visite allait d’ailleurs ruiner toute mon organisation du jour mais je m’en fichais.. royalement.



❝

— Non, non. Je suis venu ici pour bouquiner et je suis tombé sur toi par hasard…

❞


Répondis-je d’un ton sarcastique, assénant une pichenette délicate sur son front. Laïna savait bien que je n’aimais pas spécialement les livres. Je ne les débectais pas non plus comme Nyx qui aurait pu tout faire flamber le sourire aux lèvres. Mais tout de même, je préférais largement m’évader dehors si le choix m’était donné. Quelques toussotements alentours me firent relever la tête. Planqué dans les multiples allées de la bibliothèque royale, l’auteur n’était pas visible à mes iris perçantes. Et bien que cela fut fort irrespectueux compte tenu de notre rang, j’étais le premier à avoir troublé la quiétude du lieu… D’autant plus que bien des curieux porteraient une attention toute particulière à l’écho de nos voix. Je me penchais alors sur le large bureau, posant une main sur l’un des ouvrages.



❝

— Veux-tu que je t’aide à rapporter tout cela dans tes quartiers ou ailleurs ? Nous ne pourrons pas discuter librement par ici.

❞


Nous avions tellement de choses à se raconter. Malgré ses quelques lettres, j'imaginais son voyage bien plus palpitant que les quelques bribes qu'elle m'avait transmises. Et il fallait que je lui parle de Père... d'une manière ou d'une autre. Peut-être qu'en aillant été si loin de lui, elle arrivera à l'atteindre. Peut-être qu'elle réussira là où j'ai échoué lamentablement. J'avais été trop impatient, trop présent, trop insistant. Mais le manque de sa fille et malgré elle, sa ressemblance avec maman.. aiderait peut-être... Mes yeux vairons n'avaient pas quitté les livres. Je n'avais pas spécialement envie que ma sœur y lise le jugement que je m'affligeais en cet instant.



— Gabriel Tinuviel —
#5AC0E7

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❝ Mystery seeker, insatiable scholar, ...
She was many things but most of all
she was my lil' miss Sunshine. ❞

Je répondis poliment à l’esprit qui accompagne Laïna par un hochement de tête, répliquant son comportement, avant de le remercier d’un mot à voix haute sans donner plus de précisions. Évidemment je pensais bien sur au fait qu’il l’avait protégé durant trois ans. Mais s’il prenait ça pour un simple remerciement à nous aider à porter les livres, ça me convenait parfaitement. Je n’étais pas du genre à étioler mes pensées et mes sentiments. Shan était déjà parti ranger les ouvrages quand ma sœur se releva en poussant une belle pile vers moi. Je comptais des yeux le nombre d’écrits académiques probablement aussi lourd à lire qu’à porter des heures durant.



❝

- Six, c’est tout ? Je t’aurais pensé plus gourmande. Quoi que, la qualité avant la quantité, je suppose que tu as bien choisi.

❞


Vu la manufacture élaborée des ouvrages, ce n’était pas à douter. J’attrapais la pile et la soulevais sans peine, ramenant le tout contre mon bassin. Laïna se mit en route et je la suivi sans un mot. Lorsque nous passèrent la porte de la bibliothèque royale, je souffla discrètement, soulagé d’être enfin sorti de ce gigantesque lieu bien trop oppressant à mon goût. La loi du silence conventionnelle qui y régnait me dérangeait au plus au point. Ma sœur soupira audiblement et je posa mon regard sur elle du coin de l’œil. Un faible sourire étira la commissure de mes lèvres alors que je lisais l’inquiétude sur ses traits. Laïna n’était pas dupe, elle savait pertinemment que le sujet de Père serait abordé aujourd’hui. Bien sûr, je ne comptais pas l’embêter avec ça directement mais j’avais besoin de son avis.



❝

- Tu sembles en forme !

❞


Se rassura-t-elle d’une voix chantante. Je répondis par un rire léger. Bien qu’en trois ans j’avais quelque peu changé, je doutais que ma chère sœur parlait de ma prestance ou de ma petite prise de masse. D’autant que j’avais hérité de la taille de notre père qui aidait à camoufler ce dernier point. Je n’étais clairement pas devenu un ours mais à force de galoper partout dans Roncëlyon et de m’entrainer pour être prêt à défendre le royaume face aux Ancestraux, je n’avais pas amélioré que mon don. La Fissure avait fait l’effet d’un coup de poing, je ne pouvais plus vivre en me prélassant derrière nos parents. Encore moins lorsque j’étais responsable de l’état de notre roi et de la disparition de sa reine…



❝

- Il faut bien.. Sinon Roncëlyon serait devenu un bazar innommable.

❞


A peine eus-je fini ma phrase que nous arrivèrent dans le large couloir qui séparait nos espaces de vie. Je pris la première à gauche et ouvrait la porte en tenant les livres d’une main. Je me recula pour laisser Laïna découvrir mon étude. Auparavant, cette pièce immense était dédiée aux serviteurs de l’aile mais je l’avais fait vider, retaper et j’avais fais sauter le mur qui joignait mon bureau et cette salle. Maintenant j’avais soixante pourcent d’espace en plus et peut-être même que Laïna jalouserait mon lieu de travail. La large étude comportait un salon, un bureau immense, plusieurs bibliothèques et deux ilots latéraux sur lesquels de nombreux papiers attendaient mon attention. Le tout était très lumineux, une triple baie vitrée allant du sol à deux mètres et demi de haut – presque jusqu’au plafond – permettait une vue imprenable sur Babylon et Elvendil. En cas de besoin, j’avais même fais installer une barre en fer forgé qui accueillait deux pans de rideaux lourds pour occulter la lumière du jour ou de la lune. Nous pouvions nous installer sur le grand canapé en L avec ses deux larges fauteuils ou bien prendre d’assaut ce pauvre bureau qui croulait sous les requêtes. Dans tout les cas, il faudrait faire de la place. J’étais en retard sur mon planning mais j’omettrais la raison toute particulière qui en était la cause.



❝

- Bienvenue dans ma nouvelle étude ! Les Dames d’abord.. Soufflais-je en jetant le menton en direction de l'entrée, un lumineux sourire sur les lèvres. Je compte sur toi pour m’expliquer pourquoi tous ces vieux bouquins viennent s’incruster dans nos retrouvailles. Ajoutais-je, un brin taquin mais surtout curieux.

❞



— Gabriel Tinuviel —
#5AC0E7

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Charge de travail

supplémentaire

❝ NOT AS BIG A BROTHER AS I WANTED TO BE.
BUT A BROTHER NONETHELESS. ❞

Je suivi silencieusement Laïna alors que ses yeux curieux et envieux scrutaient les moindres détails de mon étude. Des moulures parcourant les murs aux meubles raffinés qui donnaient à cette pièce toute sa prestance. Des vitres massives permettant un véritable bain de lumière aux décorations minimes mais savamment trouvées et placées pour habiller l’espace. J’étais plus que satisfait de ce lieu et je pouvais avouer sans crainte préférer ce bureau à mes propres quartiers. Bien que les bains royaux… Les bains royaux étaient tout de même quelque chose. Nous ne pouvions pas rivaliser avec ceux de nos parents, grands dieux non ! Mais, il fallait avouer que nous avions des résidences outrageusement impressionnantes…


Un sourire satisfait sur le visage, je referma la porte derrière moi et esquiva du regard les monticules de requête qui attendaient mon attention. J’aurais bien assez de temps pour me miner le moral avec tout ceci plus tard, après avoir raccompagné ma chère sœurette dans ses propres appartements. Car, à n’en pas douter, nous serions encore ici au coucher du soleil. En matière de travail, ni Laïna ni moi n’avions conscience des limites appropriées qu’une personne lambda se donnerait. Peut-être était ce la passion de bien faire, la curiosité de d’apprendre de nouvelles choses ou bien simplement le plaisir d’échanger sur la question. Oui, j’aurais pu parier sur le fait que nous allions pour sûr perdre notion du temps. Tout du moins tant qu’elle ne me forçait pas à lire la totalité de ces ouvrages. Je lui laisserais ce bonheur. J’avais de toute façon trop à faire pour me perdre dans des livres qui n’étaient pas nécessaire à mon travail.


J’avais hâte d’écouter ma sœur. Qu’avait-elle fait et découvert durant son voyage ? Pourquoi revenir maintenant ? Après tout ce temps, elle devait avoir apprit quelque chose. C’était sûr. Il y avait un élément déclencheur à son retour. Tout ce que j’espérais c’est qu’il soit positif. Et… Égoïstement, qu’elle rentrait pour de bon ici. Bien que Babylon soit immense… que nôtre vie ne soit pas des plus communes.. ce château, si froid puisse-t-il paraître aux autres, était notre maison. Et j’espérais retrouver ce semblant d’équilibre qui nous avait autrefois bercé dans notre enfance. Peut-être étais-je utopiste ou simplement me berçais-je de douces illusions. Seul l’avenir me donnerait une réponse. J’espérais aussi peut-être aborder un sujet toutefois plus sensible et personnel avec elle. Mais je n’étais pas convaincu que le timing soit idéal. Chaque chose en son temps.


Laïna papillonna à son aise dans l’enceinte avant de finalement jeter son dévolu sur le salon bleu nuit. Elle s’installa et libéra ses mains avant de me faire face alors que je m’avançais à mon tour pour la mimer à l’identique. Je me pencha pour déposer ma tour de livres et Laïna prit la parole.



❝

— Je t’expliquerais l'intérêt de ces ouvrages en temps voulu, et le moment n’est pas encore venu cher frère… Pour l’heure, laisse-moi quelques minutes pour te jalouser cette merveille, et imaginer des plans pour y placer mon propre bureau. Elle rit et je la joignis dans cet élan avant de m’installer à sa gauche tout en prenant une moue mêlant sérieux et un petit sourire en coin évocateur.
— Je crains que le temps où nous partagions tout ne soit révolu Laïna. Vois-tu, j’ai parfois des invités de marque ici. Je ne peux décemment pas les recevoir avec une telle énergumène dans la pièce et je n’ai déjà pas assez de place pour tout ça.. Dis-je en montrant les piles de papier d’une main lasse. Alors un bureau de plus… Avec ton envahissante passion littéraire… Non merci !

❞


Ajoutais-je en riant cette fois-ci sans retenue. Et bien que je pensais en effet à des invités du royaume… Je pensais aussi et surtout à Ariane. Même si elle n’avait encore jamais mis les pieds dans cette étude par manque de temps dans ses rares déplacement à Babylon.., j’espérais qu’un jour proche, elle serait annoncée à ma porte prétextant à moitié une visite pour discuter du sujet de ses recherches. Nos retrouvailles étaient toujours de trop courte durée à mon gout, alors il était hors de question que ma chère sœur viennent s’accaparer la moindre seconde de ce temps précieux.



❝

— Je serais cependant ravi de t’aider à réorganiser tes quartiers. Si bien sûr tu reviens parmi nous pour de bon. J’imagine que tu as bien des choses à me raconter. Ton état, ton voyage, tes.. recherches, semble-t-il… Dis-je en posant le regard sur le monticule d’ouvrages. Je suis toute ouïe.

❞


Demandais-je explicitement. Je n’étais pas des plus patients dernièrement. Désolé sœurette. Pour une fois, je préférais en venir directement aux sujets d’importance capitale. Car bien que j’avais décidé de rayer le planning de la journée, le travail lui ne comptait pas prendre de pause pour s’accumuler…



— Gabriel Tinuviel —
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❝ BETTER BE A FULL BUT HEAVY HEART,
THAN AN EMPTY AND LONELY ONE. ❞

T H E M E

Je pris note de la grimace, faussement désabusée de ma sœur en retenant un rire tant la facette de princesse venait de voler en éclat. Mais c’était là toute la beauté de notre famille. Malgré la couronne, nous ne nous entichions pas de l’étiquette entre nous. Lorsque son regard se riva sur les nombreux ouvrages, le mien se fit plus sérieux.



❝

— Alors tous d’abord mon cher frère, je note que tu ne veux pas de moi ici ! Et sache que tes invités de marque ne duperons personne et qu’il faudra bien que je LA rencontre un jour !

❞


Un fin sourire releva mes pommettes. Il est vrai que Laïna ne savait pas, nos rares lettres échangées se limitaient au strict nécessaire. La dernière fois qu’elle avait vu Ariane c’était à notre anniversaire, pour nos vingt-quatre ans. Et la guerre avait tout chamboulé. Nous n’avions pas réellement abordé le sujet depuis, esquiver la question à l’époque était bien plus aisé. Il faut dire que je ne savais pas réellement sur quel pied danser. Je doutais encore à cette période, non pas de notre capacité à nous aimer mais bien de la résistance de notre couple. Savoir si quelqu’un n’en a qu’après votre titre et votre apparence et aisé à déceler. Savoir si votre moitié saura supporter la distance, le manque, la violence poétique de la haute société et les obligations d’un prince héritier… Il y avait là une faille bien plus vertigineuse que la Fissure. Mais Ariane n’avait pas failli, jamais. En tout cas, jamais en ma présence. Et dans les deux cas, ça prouvait bien la force inébranlable de sa résolution, la sincérité de son attachement.


Laïna avait surement posé cette carte pour me tirer la réponse de la question qui brulait ses lèvres. Étions-nous toujours entichés l’un de l’autre ? Et à cela j’avais presque envie de lui répondre que bien des hommes se stoppait ou s’arrêtait sur son passage. Je ne faisais pas exception à la règle. Mais contrairement à la majorité de ces chiens, j’aimais Ariane pour sa grandeur d’âme, sa bonté d’esprit et son amour de la vie. Pour sa légèreté et sa langue acerbe. Sa volonté et sa patience. Notre amourette avait dépassé toutes mes espérances. Il ne restait plus qu’à convaincre le Roi de Roncëlyon. Une mission ma foi bien.. aisée.



❝

— Pour ce qui est de l’organisation de mes quartiers, il est évident que je vais m’y atteler, je n’ai pas de bureau digne de ce nom et il est impératif que j’ai un lieu de travail correct. Autant pour mes propres recherches que pour t’aider à te débarrasser de ...ça. Donc pour répondre à ta presque question, oui je reste ici pour une durée que je n’ai pas encore déterminée mais qui promet d’être longue. Pour le reste, je reviens de chez notre oncle, où j’ai passé de long mois, loin du tumulte et du bruit des armures. Cela m’a fait du bien et j’ai mis cette période à profit pour augmenter ma perception spirituelle et la maîtrise de mes dons. Tu seras certainement soulagé d’apprendre que je ne suis plus soumise à une garde rapprochée omniprésente, je suis capable de me défendre seule !

❞


Nouveau sourire, quoi qu'un peu en fausse note. En voilà des nouvelles intéressantes. Je me demandais l’espace d’un instant si je devais la tester sur le champ. La rapidité avait toujours été le plus gros point faible de ma sœur. Ses incantations ne seraient jamais aussi rapides que moi et d’autres potentiels ennemis tout aussi bien pourvu de magie. Je savais bien qu’elle n’était pas sans défense, mais de là à ne plus avoir besoin d’une garde rapprochée lors de ses sorties.., je demandais à voir. Peut-être qu’il me faudrait la faire suivre par des Ombres sans noms… J’y réfléchirais en temps et en heure. Je me releva et me dirigea vers l’entrée principale.



❝

— Je ferais envoyer quelque chose pour remercier oncle Deb. C’est la moindre des choses. Dis-je sur le chemin avant d’ouvrir la porte en bois massif. Passant une jambe dans l’entrebâillement, je fis signe à la première domestique qui croisa mon regard. Bonjour Elyria, pourriez-vous faire le nécessaire habituel ? Ma sœur a fait long voyage.
— Oh.. ! Bien sûr, Votre Altesse. Je ne savais pas que la Princesse était enfin rentrée ! Je me hâte ! Elle hésita un instant et ajouta quelques mots pour ma sœur. Bon retour, Princesse Tinuviel !

❞


Elle fila aussi vite qu’elle ne s’était approchée. Mon expression s’était adoucie en remarquant son sourire qui trahissait toute sa joie des plus sincères. Laïna avait toujours été très aimée des nôtres mais il y avait un je-ne-sais-quoi avec les suivantes de notre étage. Peut-être que sa douce âme rêveuse de nos jeunes années les avaient marqué plus que je ne le pensais. Elle était une opale dans ce château de pierres fines. Aux multiples couleurs et reflets. Tantôt bleue, tantôt rose. Aussi irisée qu’une étoile filante. Il était logique que le peuple la regarde avec tendresse et adulation. Je revins m’installer à ma place originelle, croisant les jambes et observant un instant ma sœur en silence. Et je me lança enfin.



❝

— Je suis ravi que tu sois si motivée à me débarrasser de ce monticule de documents. Les permis de construire, les demandes de fonds, de biens et les signalements nécessitant une intervention de l’armée n’arrêtent pas d’affluer. Roncëlyon n’est plus aussi sûre qu’auparavant. Je soupire lourdement. Nous avons perdu beaucoup de notre armée, un tiers pour être exact. Gérer les territoires les plus reculés est devenu plus compliqué. Certains clans s’échauffent et avec papa…, je ne pouvais pas me permettre une visite diplomatique. Ton retour va me donner l'opportunité de remettre les choses à leur place.

❞


Comme si elle avait attendu la fin de mes paroles, la domestique vint frapper à la porte délicatement. Je lui intima d’entrer et elle passa la porte accompagnée d’un chariot en argent, drapé d’une nappe blanche brodée. Après nous avoir salué à tour de rôle, en quelques secondes elle déposa plusieurs assortiments de biscuits, de gâteaux et de fruits ainsi qu’une carafe de thé en porcelaine. Fort heureusement pour moi et pour mon manque de sommeil, la suivante n’avait pas fait que ramener des sucreries à ma sœur. Elle me déposa un café fumant devant moi. Une petite nouveauté qui venait des contrées chaudes de Weldenia et qui gagnait en popularité à la Cour. Et elle disparu sans avoir quitté son sourire radieux. Je récupérais ma boisson d’une main et posant mes iris sur le liquide sombre, je soufflais une fois.



❝

— Et pour en revenir à ta petite remarque de tout à l’heure. Sache que tu as déjà rencontrée mon invitée la plus éminente. Étant donné que tu comptes rester ici.. un moment disons. Tu finiras forcément par la croiser. Ariane effectue des recherches très intéressante pour notre race. Mais je lui laisserais le plaisir de t’expliquer tout cela. Elle est devenue très influente à Renyar et ses recherches lui octroie un passe-droit particulier à Roncëlyon. Même si papa n’approuve pas notre relation, il ne peut pas faire barrage à ses recherches. Si elle réussit, elle va changer la vie de bien des Vampires. Annonçais-je en souriant, foncièrement fier de la femme qu’elle était devenue. Je releva le regard sur Laïna en inspirant profondément. Personne ne nous suspecte tu sais ? Il n’y a que notre famille qui soit dans la confidence. Alors, je compte sur toi pour la protéger aussi. Elle m’est très précieuse.

❞


Ne restait plus à parler que de ma sœur, véritablement, et de ces étranges ouvrages portant sur les rêves, le sommeil et les diverses choses liées à la spiritualité. Tout un domaine que je ne maîtrisais pas du tout...



— Gabriel Tinuviel —
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❝ Some secrets untold. ❞

T H E M E

Je me demandais si je pourrais parler à Laïna de mon propre subconscient plus tard. Pour l’instant, je voulais vraiment que nous nous concentrions sur nos parents. Le sommeil, comme l’inconscient et le subconscient était accessible aux Mentis. Je n’étais pas un docte dans le domaine des essences et encore moins dans celle-ci. Les énergies ombrales étaient bien loin de ma propre essence élémentaire. Il était difficile pour moi d’appréhender et de maîtriser un tel sujet. Et j’étais bien incapable d’exploiter le plein potentiel de ce vaste univers qu’était la conscience. Néanmoins, Laïna elle y parvenait presque. Pourtant, son éther résonnait avec le plan astral, bien loin également des origines des Mentis. Toutefois, je savais qu’elle avait découvert des informations à force de recherche et de pratique. Peut-être par projection astrale ? Était-elle capable de ce genre de magie terrifiante ? J’avais moi aussi besoin de réponses.



❝

— Ne t’inquiète pas pour Papa, je serais ton alliée pour cette relation. Après tout Elle m’a sauvé la vie… Annonça-t-elle en réponse à mon presque monologue. Je perdis soudainement toute expression en me figeant sur place. J’avais besoin de réponses, pas de davantage de questions. Comment ça, elle — Je suppose que tu te demandes pourquoi j’étudie ce sujet… Autant être directe. En étendant mon esprit, comme j’ai appris à le faire, auprès de Tescanda, je réussi à percevoir sa présence. Comme si il était endormi et affaiblis. Donc si j’arrive à le sortir de cette espèce de sommeil éthéré...

❞


Ajouta-t-elle en toute innocence, en pointant le monticule de livre en attente d’un quelconque intérêt de notre part. Un murmure était aussi audible pour nous autres qu’un idiot du village beuglant dans la pièce d’à côté. Le changement de sujet n’avait pas fait mouche non plus. Bien que je souhaitais prioriser nos parents et Tescanda, deux choses n’allait pas du tout dans cette tirade effrontée.



❝

— Attends, attends.. Ariane t’as sauvé la vie ? Ta VIE ? Ma ARIANE ? Pourquoi tu ne m’as pas prévenu si tu étais en danger ? Ça commence à faire beaucoup de questions sans réponses. Je soupirais légèrement en m’installant plus confortablement, essayant de me détendre alors que je me crispais davantage à chaque découverte. Reprends depuis le début s'il le faut mais je refuse de discuter de Tescanda sans avoir d’abord la certitude que tu vas bien, que tout vas bien. S’il te plaît.

❞


Soufflais-je à la fois sérieux et spontanément inquiet.



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❝ I WOULD’VE COME AND SHE KNEW IT. ❞

T H E M E

Ma sœur me réponds rapidement, elle me rassure avec une familiarité déconcertante qui m’arrache cependant un faible sourire amusé. Trois ans… Juste après Heiron et la Fissure donc pendant son voyage. Je fronce un instant les sourcils. Laïna n’avait jamais parlé d’un quelconque problème de cette envergure dans ses écrits… Un détail qui pourtant était d’une importance capitale, j’aurais.. ! J’aurais quitté Babylon pour venir la voir. Bon sang.. Avait-elle omis tout ça pour ne pas m’importuner, pour me laisser gérer la province… ? J’inspire et expire longuement et profondément par le nez. Laïna change de position et se détends avant de poursuivre. Dévoilant son rejet du sang, sa perte de conscience sur le territoire de Renyar et.. la miraculeuse intervention de mon aimée. Ariane avait un don pour mettre les mains sur les Tinuviel, à n’en pas douter.


Haa.. Mon visage afficha une grimace retenue mais visible. Ne pas boire de sang pendant un certain temps, impliquait surement des jours voir des semaines connaissant la capacité à dédramatiser les choses de ma sœur. Et si elle avait fini par perdre connaissance alors son petit jeu avait duré encore et encore. Elle avait surement dû finir sauvageonne au possible. Une chose qui n’était pas arrivée depuis nos plus jeunes années lorsque nous apprenions encore à canaliser notre soif grandissante pendant nos poussées de croissance. Un jeune enfant ne demande pas, il prend. Et comprendre et accepter que nous ne pouvions pas mordre le premier domestique qui passait nous voir avait été ma foi… un calvaire.


Je me redresse alors en entrelaçant mes doigts, posant mes coudes contre mes cuisses. Le regard soudainement plus sérieux. Elle avait potentiellement mit en danger Ariane. Et cette idée me rendait furibond. Mais je ne pouvais pas en vouloir à ma sœur quand bien même elle aurait pu la blesser. Ariane n’avait rien dit non plus après tout. Par soucis de ne pas inculper ma sœur ou pour ne pas m’inquiéter à son tour. Et bordel je détestais ça ; être mis de côté de la sorte… Laïna se voulu rassurante à nouveau, m’assurant qu’elle n’était jamais retombée dans ce travers qui n’en était pas vraiment un. Il était difficile de vivre avec des traumas liés à la guerre. Heiron nous avait tous marqué au fer rouge. Je continuais encore à ce jour à culpabiliser pour toutes les vies et les familles que j’avais détruites. Mais ce qui était fait, était fait. Nous devions nous focaliser sur l’avenir pour ne pas nous noyer dans le passé. Notre père me le rappelait. Chaque jour.



❝

— Elle ne m’en a jamais parlé, tu sais ? Surement pour te couvrir. Alors tu as plutôt intérêt de la remercier la prochaine fois que tu croises sa route. Répondis-je d’une voix douce, en souriant avec une nostalgie qui trahissait le manque que je ressentais à parler d’elle. Mais je t’en prie, parlons donc de tout ça. Ajoutais-je en désignant les bouquins avant de relever mon regard sur ma sœur, plus insistant, plus bienveillant. Pour le reste, si jamais tu as besoin d’en parler ou autre. Tu sais que je suis là, mh ?

❞



— Gabriel Tinuviel —
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